AGEFI Luxembourg : Rencontre avec A. COHEN
- On 15 mars 2016
- En Publications
AGEFI LUXEMBOURG – MARS 2016 : Rencontre avec Arnaud COHEN, administrateur délégué de Forsides Luxembourg et président de Forsides France.
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«Aujourd’hui, un des principaux défis réside dans la conformité» A. COHEN
Présentez-nous en quelques mots Forsides
Forsides est un groupe d’actuariat indépendant qui a, dès sa création, été un groupe plurinational, développé autour de la France, de la Belgique et du Luxembourg. Certaines problématiques sont communes entre ces pays, d’autres moins. Nous sommes attachés à maintenir une coopération active entre chacune de nos trois entités pour nous enrichir de thématiques nouvelles mais aussi pour miser sur les atouts de notre culture commune
et de notre engagement de longue date autour des questions d’actif passif. Cela nous positionne fortement sur la mise en oeuvre de Solvabilité II, qui, comme vous l’imaginez, est une préoccupation partagée dans nos trois pays d’implantation.
Quels sont les éléments qui pèsent sur l’assurance vie?
Incontestablement le contexte de taux bas. Les répercussions en sont évidentes sur le marché français dominé par le fonds en euros, mais elles ne sont pas neutres non plus sur le marché des unités de compte. D’un côté, la baisse des taux incite à aller chercher du rendement du côté des UC, mais de l’autre, un bon niveau de taux est nécessaire pour favoriser la prise de risque dans une gestion diversifiée. Aujourd’hui, des formules d’investissement comme les variable annuities ou les fonds structurés garantis, qui étaient accessibles même aux épargnants réticents à prendre du risque, sont très pénalisés. Ensuite, la très grande pression consumériste qui est en train de se mettre en place, notamment à l’initiative de la Commission européenne, avec le règlement PRIIPs et un positionnement très fort de l’EIOPA sur ces questions. Il est effectivement important et de l’intérêt de tout le secteur, surtout dans une conjoncture économique qu’on peut qualifier pour le moins de déroutante, avec des taux négatifs et des marchés nerveux, d’exiger une distribution de qualité, tant au niveau de l’information que du conseil. Mais ce que nous constatons, c’est que des démarches comme PRIIPs qui veulent simplifier l’information des épargnants, soumettent les assureurs à une très grande complexité, ce qui signifie des coûts, car l’information sera coûteuse et lourde à produire, et de l’insécurité juridique, car ce qui est complexe est toujours contestable. En particulier, le traitement du multi support ne nous paraît pas résolu : un contrat de bonne qualité, comportant des dizaines de supports, avec un nombre raisonnable d’options de gestion financière et des types prédéfinis de gestion pourrait faire l’objet de centaines de documents d’information différents par la simple combinaison des choix offerts à l’épargnant. De même, l’assureur sera tenu de donner des informations sur la performance et les risques potentiels des fonds d’investissement, que paradoxalement les gérants de ces fonds ont été dispensés, pour 5 ans, de fournir, car ces informations sont très complexes et coûteuses à produire et ce alors que ce secteur a déjà lourdement investi pour produire le DICI.
Quels sont les nouveaux défis du secteur Assurances?
L’assurance n’en est pas à son premier défi. Nous accompagnons quotidiennement les entreprises sur Solvabilité II, particulièrement sur la modélisation, et nous pouvons mesurer l’effort d’organisation et de technicité qu’un tel projet représente, et où encore beaucoup de choses restent à mener. Aujourd’hui, un des principaux défis réside dans la conformité. A l’image de Solvabilité II, la réglementation est techniquement très ambitieuse, abondante, et les textes se succèdent très rapidement, avec une approche trans-sectorielle qui bouscule les cultures mais exige aussi une très grande cohérence entre le prudentiel et le consumériste: par exemple, la nouvelle gouvernance produit devra, pour justifier l’intérêt des nouveaux produits pour les clients, s’appuyer sur des hypothèses cohérentes avec celles utilisées pour les calculs prudentiels. De même, le défi de la transparisation des fonds d’investissement demandée par Solvabilité II, fait écho aux simulations et projections demandées par PRIIPs sur les supports d’unités de compte, qui nécessiteront là-aussi dans un certain nombre de cas de transpariser.
Comment le numérique transforme-t-il le monde de l’Assurance?
Contrairement à ce que l’on entend souvent sur la révolution technologique, nous sommes convaincus qu’elle a apporté avec elle, et continue d’apporter de très forts gains de productivité. Mais le
besoin de service d’une part, le besoin de contrôle d’autre part, étaient si forts qu’ils ont logiquement capté une part importante de ces progrès. Mais c’est très positif, le progrès technologique n’est pas là que pour faire baisser les coûts. C’est même souvent parfois secondaire par rapport à sa capacité à générer de nouveaux services, une autre expérience client et à sécuriser l’environnement par une meilleure maîtrise des risques. Néanmoins, il est évident que dans le contexte de taux bas et de pression prévisible sur les marges, les opportunités de baisses des coûts seront regardées avec d’autant plus d’attention. Mais symétriquement, quand les marchés obligataires génèrent de moins en moins de valeur, il est d’autant plus important pour l’assureur d’en générer par le service. En assurance dommage et en prévoyance, nous avons à plusieurs reprises exploité avec succès les techniques de machine learning. En ce qui concerne le big data, les espoirs sont grands, mais le modèle économique n’a rien d’évident, c’est ce que nous montrons dans un ouvrage que nous lui avons récemment consacré.
Quels sont vos principaux objectifs pour 2016 et projets pour le futur?
Notre chiffre d’affaires groupe était de l’ordre de 10 M €en 2015 et nous comptons atteindre 12 M €dès 2016, en accélérant notamment notre développement en Belgique et au Luxembourg. Il est important pour tout cabinet de conseil en actuariat d’être présent au Luxembourg. Je m’investis particulièrement, avec Xavier Collard, pour y développer notre activité auprès des acteurs locaux mais il est aussi bien sûr intéressant pour Forsides France de pouvoir également y accompagner ses clients. Le Luxembourg est de toute évidence une terre d’opportunité, ainsi qu’en
témoigne la très forte attractivité dont jouit aujourd’hui le Grand-Duché.